Depuis le 10 janvier 2025, les fabricants de dispositifs médicaux sont tenus de signaler tout risque d’interruption ou de cessation de l’approvisionnement susceptible de causer un préjudice grave ou un risque de préjudice grave pour les patients ou la santé publique dans un ou plusieurs États membres de l’Union européenne.
Jusqu’à présent, la réglementation européenne ne prévoyait de mesures de prévention des pénuries de dispositifs médicaux que dans des situations d’urgence sanitaire. Pour combler cette lacune, le législateur a intégré, via l’article 10 bis du Règlement 2024/1860 du 13 juin 2024 (le « Règlement »), une obligation pour les fabricants de signaler l’interruption ou la cessation de l’approvisionnement en dispositifs médicaux dans certaines circonstances et selon un calendrier contraignant.
Cette nouvelle exigence vise à garantir une meilleure anticipation des tensions sur le marché des dispositifs médicaux.
L’obligation de notification s’applique lorsque :
Dans ce cas, le fabricant doit informer (i) l'autorité compétente de l'État membre dans lequel il est établi ou dans lequel son mandataire est établi ainsi que (ii) les opérateurs économiques, les établissements de santé et les professionnels de santé auxquels il fournit directement le dispositif concerné.
L’information à l’autorité compétente se fait par le biais d’un formulaire officiel (MDCG 2024 – 16), qui précise les raisons de l’interruption ou de la cessation. Cette notification doit être effectuée au moins six mois avant la date prévue de l’interruption ou de la cessation, sauf circonstances exceptionnelles. Une fois informée, l’autorité compétente transmet cette information à ses homologues européens.
De leur côté, les opérateurs économiques (par exemple les distributeurs) ayant reçu la notification du fabricant doivent, sans délai injustifié, la transmettre à tous les acteurs auxquels ils fournissent le produit. L’information est ainsi relayée tout au long de la chaine d’approvisionnement, jusqu'à atteindre, le cas échéant, les établissements de santé ou les professionnels de la santé.
La Commission européenne a publié une FAQ détaillant plusieurs notions clés de l’article 10 bis du Règlement, notamment la définition de « risque de préjudice grave », les critères pour qualifier des « circonstances exceptionnelles », ainsi que les types de motifs d’interruption ou de cessation que le fabricant doit inclure dans sa notification.
En France, des mesures de lutte contre les ruptures de dispositifs médicaux existent depuis l’introduction par la loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 de l’article L. 5211-5-1 au sein du code de la santé publique. Selon ces dispositions, les industriels doivent informer l’ANSM dès que l’indisponibilité des dispositifs médicaux qu’ils fabriquent et/ou commercialisent, en raison d’une rupture, d’un risque de rupture ou d’un arrêt de commercialisation, peut entraîner un risque pour la prise en charge de l’état de santé des patients. Les critères définissant cette situation, les modalités déclaratives à l’ANSM, ainsi que les mesures correctives à mettre en œuvre en cas de survenue, doivent encore être établis par voie réglementaire.
Bien que le Règlement et le code de la santé publique poursuivent des objectifs similaires, plusieurs différences sont à noter. En particulier, le mécanisme européen se distingue par son caractère plus contraignant. Il impose une notification dès la suspicion de risque de rupture, avec un délai strict d’au moins six mois avant la date prévue de l’interruption ou de la cessation. De plus, il prévoit une information globale impliquant tous les acteurs de la chaîne d’approvisionnement. Le code de la santé publique, quant à lui, impose la mise en œuvre de toutes les mesures utiles et nécessaires pour assurer la continuité de la prise en charge de l’état de santé du patient, bien que ces modalités doivent encore être définies par voie réglementaire.
En tout état de cause, le Règlement, désormais en vigueur, s’impose directement aux fabricants qui mettent des dispositifs médicaux sur le marché de l’Union européenne.