La Cour de cassation a renforcé la protection des consommateurs dans les ventes de véhicules en ligne par un arrêt important rendu le 17 septembre 2025. Dans cet arrêt (Cass. civ. 1, n° 23-16.524), la Cour de cassation a considéré que le droit de rétractation de 14 jours prévu à l'article L. 221-18 du Code de la consommation français s'applique aux véhicules neufs achetés en ligne auprès de vendeurs professionnels, même si le véhiculé a été configuré selon les préférences de l'acheteur.
Un consommateur achetant une voiture en ligne a versé un acompte de 5 000 euros pour un véhicule neuf et a souhaité se rétracter peu après la livraison. Le professionnel a refusé, affirmant que le véhicule avait été personnalisé selon les spécifications de l'acheteur et que cela excluait donc l'application du droit de rétractation en vertu de l'article L. 221-28. Les juridictions ont dans un premier temps donné droit au vendeur en estimant que la voiture était effectivement personnalisée pour les besoins du client dans la mesure où le professionnel l'avait commandée spécifiquement pour le client, sur la base du modèle, du moteur, de la couleur et des options que le client avait sélectionnées.
La Cour de cassation a cassé cette décision et jugé qu'un véhicule configuré avec des options choisies parmi un ensemble d'options standard proposées par le constructeur n'est pas un bien « nettement personnalisé » qui exclurait le droit de rétractation de l'acheteur. La Cour a considéré qu'un produit n'est véritablement personnalisé que s'il a été modifié d'une manière si unique que le vendeur ne peut raisonnablement pas le vendre à un autre acheteur.
Dans un précédent arrêt rendu en 2013 dans le secteur, la Cour de cassation avait jugé que l'immatriculation d'un véhicule au nom de l'acheteur n'était pas suffisante pour être considérée comme « nettement personnalisé » et que cela ne devait pas empêcher l'acheteur d'exercer son droit de rétractation. L'arrêt du 17 septembre 2025 va plus loin : si l'immatriculation au nom de l'acheteur est une démarche administrative qui ne semble pas bloquer la vente du véhicule à d'autres consommateurs, la solution semble moins évidente lorsqu'il s'agit de personnaliser un véhicule avec des spécifications techniques, même si ces dernières sont proposées dans un catalogue d'options standard. En effet, si le choix des spécifications d'usine est offert à tous les consommateurs, la combinaison de plusieurs caractéristiques et spécifications rend la vente à d'autres consommateurs beaucoup plus difficile.
Cette décision s'aligne sur l'approche favorable aux consommateurs adoptée au sein de l'Union Européenne. Les tribunaux et les autorités de réglementation de certains autres États membres interprètent également l'exception relative aux produits sur mesure de manière restrictive, en se concentrant sur la question de savoir si un produit donné peut être vendu à un autre acheteur.
L'arrêt a des implications importantes pour les constructeurs automobiles et les concessionnaires professionnels proposant des ventes en ligne ou par l'intermédiaire d'autres canaux de vente à distance : il n'est, en principe, plus possible d'invoquer les spécifications ou configurations standard de l'usine pour justifier le refus d'une demande de rétractation. Les clauses contractuelles visant à exclure ou à limiter les droits de rétractation pour les véhicules dotés d'options d'usine standard sont susceptibles d'être inapplicables. Les professionnels doivent donc veiller à ce que leurs conditions et procédures soient conformes aux exigences légales en matière de droits de rétractation des consommateurs.